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Souvenirs de Paul Arene

Par Philippe Laforme

J'ai rencontré Paul en 1988 après mon service militaire. Je grimpais régulièrement en Blocs à Fontainebleau depuis 6 ans. A l'époque je passais des blocs en 6c, surtout en dalle (j'ai des grands bras, ça aide). Un ami originaire du sud (Thibaud ), plus porté sur la falaise, m'a entraîné dans une sortie à Vieux Château. C'est là que j'ai rencontré Paul. Il était seul, et m'a demandé ce que je savais faire. J'ai répondu 6c bloc. On a donc décidé de grimper ensemble. et là j'ai vu la différence entre un grimpeur de bloc et un grimpeur de falaise. Voie d'échauffement : 6c dans une sorte de fissure tortueuse. 5 m plus haut j'étais cuit. Lui, randonnait en prenant un malin plaisir à coincer tout ce qu'il pouvait. J'ai quand même réussi à prendre ma revanche à Fontainebleau, sur mon terrain.

Finalement, on s'est mis à grimper le soir après le boulot en bloc et parfois le Week-end à Bleau. Souvent le WE il allait grimper en falaise (la Roque ou ailleurs ) avec son ami Jean-François. Son truc, c'était les voies longues et surplombantes, moi c'était les couennes. Quand il m'emmenait en falaise, je finissais cassé : Pas le droit de descendre tant que ça ne passait pas. Bon, il faut avouer que je ne rechignais pas à la besogne. J’ai eu beau m'entraîner avec Thibaud (le séducteur ) et Pascal (le mutant ) il conservait une bonne longueur d' avance. Heureusement qu'il me restait le bloc pour prendre mes petites revanches.

Et l'été alors. Eh bien, moi l'été je faisais des treks, du parapente et lui allait grimper à Chamonix avec des copains. C'est fou le nombre de personnes qu'il connaissait. Cette époque des copains Bleausards, a durée jusqu'à ce qu'il parte pour le Népal.

Après son retour, il est parti faire un mastère à SOPHIA et est resté là bas pour travailler. Son boulot n'a pas été toujours intéressant ; mais SOPHIA pour Paul c'était le paradis. Cela valait bien quelques sacrifices. Là bas, il s'est fixé comme objectif de faire de l'escalade à haut niveau en compétition. Il a même réussi à finir 10ème au championnat de France d'escalade et passait allègrement du 8a en falaise. Je pense qu'il aurait pu mieux faire s'il n'avait pas commis quelques erreurs au niveau alimentation. Pendant ce temps, j'ai continué ma progression en bloc jusqu'à passer du 7b bloc.

On aurait pu se perdre de vu si l'on avait pas d'autres passions communes : Le parapente et le ski de rando. On a donc fait des WE parapente avec Eric. Eric a arrêté après avoir manqué de peu un taureau et fleurté avec une ligne électrique. Paul a fini par troquer son fer à repasser pour une voile de compétition. Je ne sais pas si c'était une bonne idée car après il avait peur de l'utiliser tellement les suspentes étaient fines. Il avait bien un 2nd suspentage mais en 6 ans, il n'a pas trouvé le temps de le changer : Pas de doute la montagne l'occupait.

Fort de mon niveau en bloc, Paul voulait me faire faire ses voies préférées (des voies dures) à la tête de chien, à Chateauvert... le bilan était toujours le même 10 blocs de 4 m ce n'est pas égal à 40m de falaise. C'était agaçant. Heureusement, il m'a rassuré quand il a voulu voir s'il avait progressé en bloc à Bleau. L'honneur des bleausards était sauf ; chacun son terrain. Je crois, que sans Paul, je ne serais pas allé faire de grandes voies engagées au Verdon. Il avait une technique de grimpe très sophistiquée (également au niveau du matériel ) et était perfectionniste.

Paul était très polyvalent. L'hiver nous pratiquions régulièrement le ski de rando ensemble.

Vers 1996 Paul réduisit son entraînement en escalade et intensifia sa pratique du ski : Il s'était trouvé confronté à d'insolubles problèmes de peau sur les doigts. Après 2 jours de grimpe consécutifs, il avait la peau des doigts qui partait en lambeaux. La grimpe avec des gants de golf ça fait très chic. Les vendeurs de Decatlon devaient se demander pourquoi il achetait autant de gants. En 1997, il intensifia encore plus sa pratique du ski. Au retour d'une rando autour du pic de Roche brune, Paul a décidé de faire les soldes à Briançon. Il a alors troqué son vieux matériel de 15 ans d'âge (c'est bon pour le whisky pas pour les skis) contre de superbes DYNASTAR. Il a tout renouvelé, chaussures, skis, fixations, chaussures et même le sac à dos. Ceux, qui connaissent Paul apprécieront. Après ça, son matériel faisait au moins 4 kg de moins que le mien. Dur, dur. Je crois, qu'ensuite, il est sorti tous les WE jusqu'à la fin de la saison. Il fallait bien amortir le matériel. Dommage qu'il lui manquait un petit peu de caisse à la montée car il était très, très fort en descente.

Voilà, la dernière fois que j'ai vu Paul, c'était au mois d'août 1998 pour faire du parapente à Ceillac. On devait se voir au Jour de l'An pour faire de la cascade mais la météo en a décidé autrement.

Paul nous manquera, à moi, à ma femme et à ma petite fille, il était bien plus qu'un copain de grimpe, et il avait le don de provoquer la sympathie autour de lui.

Quelques annecdotes

Paul et la diététique

Paul suivait un régime très strict : yaourt, pates, yaourt. Mais lors de nos rencontres à Noel à Embrun, après avoir fait cuire ses pates, il finissait toujours par se laisser tenter par une assiette de raclette.

Paul et les femmes

Un soir après avoir grimpé à Bleau, nous sommes allés voir une course de lévriers dans un cynodrome. La course va commencer, les « concurrents » sont présentés aux spectateurs. Paul s'écrie « belle bête ». Une dame distinguée lui répond en précisant le pedigree des animaux. Paul, lui répond « mais non, je parlais de la fille qui tient les chiens en laisse ». La dame répond « Ah oui, et bien c'est ma fille ». Après une courte discussion, Paul s'en tire avec 2 billets pour la prochaine course.

Paul et l'hospitalité

Au mois d'Avril 98, je suis allé voir Paul à Antibes pour faire du ski de rando. Après avoir préparé nos affaires pour le lendemain, Paul fait cuire un paquet de pâtes. Nous nous attablons, Paul se sert. Après un certain temps, il me dit qu'il a bien du mal à manger ses pâtes ce soir ; il me regarde et s'aperçoit alors qu'il s'est versé toutes les pâtes dans son assiette. Ah, le célibat….

Paul et les économies

Paul était très économe. Pendant les vacances de Noel (1997, je crois ) nous partons faire du ski aux Orres (les cascades n'étaient pas suffisamment formées ). Je lui demande s'il a des chaînes car la météo a prévu de la neige. Il n'en a pas. On s'arrête à une station service. Paul, trouve que la station « abuse un peu ». On repart. En fin de journée, il commence à neiger : Catastrophe. On file à la voiture. On arrive péniblement à faire 4 km et on doit abandonner la R21 dans un champ de neige. 10 km à pieds, ça use, ça use …Heureusement, la marche c'est bon pour « laforme »

Paul le noctambule

Paul m'a initié à la cascade de glace et au scooter des neiges dans la même journée. A Noel 1993, il me propose d'aller faire de la cascade de glace à l 'Alpe d'Huez avec son ami Tuan. Départ d'Embrun aux aurores (enfin, bien avant quand même) avec Annette et Elisabeth. Je dois admettre, que fidèle à ma réputation, on n'est pas arrivé très tôt. Arrivés au pied des cascades, Paul joue les professeurs et Tuan fait des photos. L'élève est déclaré apte, on part donc voir « symphonie d'automne ». Il fait beau, la glace est bonne : On y va. Paul grimpe en tête, tout va bien. Arrivé à la dernière longueur, Paul enchaîne. Il faut faire vite, le soleil se couche. Et là, surprise, la corde est trop courte. Je rallonge le relais, mais c'est toujours trop court. Je me vache, et libère Paul qui monte au relais suivant. J'attends alors patiemment sur mon relais avec ce petit courant d'air frais qui me chatouille les narines. Je ne sais ce qu' ils fabriquent là haut, mais j'ai le sentiment d'attendre durant des heures. D'ailleurs, il fait nuit noire. Ouf, je vois la corde. Il était temps, je ne pensais plus qu'à boire un chocolat chaud. Finalement le chocolat va arriver plus tôt que prévu. Un pompier, en scooter des neige, vient d' arriver au pied de la cascade. C'est ma femme Annette, qui inquiétée par l' heure a appelé les secours. Il y a trois places, une sur la selle et deux dans le brancard en se tassant avec les sacs à dos. Au cours de la descente en scooter, j'ai cru dix fois finir à l'hôpital, j'avais la paire de crampons de Paul collée au bout de mon nez. Ce qui est amusant, c'est qu'on terminait souvent à la nuit tombée avec Paul. Avec l'habitude, on prenait la frontale (et des piles ).

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