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Camp 4.

Le lendemain, à l'aube, cela commence par une descente, puis un petit pendule qui permet de rejoindre une fissure autrement inaccessible depuis la vire du bivouac. C'est le cinquième que nous avons à faire depuis le début de la voie. Des pendules, dans le Nose il y en a tellement que Harding écrivait qu'alors que la voie ne fait "que " 950 mètres de hauteur, il y a en fait 1110 mètres à grimper à cause de la hauteur perdue à chaque fois. Mais le lecteur n'est peut-être pas familier avec les pendules, qui sont une chose relativement rare ailleurs. L'idée est de se balancer au bout de la corde pour franchir une zone horizontale dépourvue de prises. Au mieux, c'est une traversée en tension, mais il s'agit souvent d'abord de descendre en tension sur la corde, en essayant d'estimer la longueur de corde qui sera nécessaire, puis de prendre de l'élan, et en bout de course d'essayer d'attraper quelque chose, sous peine de devoir repartir dans le sens opposé en prenant de plus en plus de vitesse, et d'avoir à recommencer plusieurs fois, comme Frank a du le faire plus haut dans le King swing, le double pendule le plus impressionant de la voie. Du relais, on n'aperçoit rien d'autre qu'un pan de rocher vertical, et le point de pendule intermédiaire, très bas. Le reste est caché par un petit éperon, et ce n'est qu'une fois la manoeuvre terminée que l'on réalise qu'on a franchi une distance horizontale d'une vingtaine de mètres. Si le premier peut se balancer à partir d'un point bas, bloqué par la corde, il n'est pas question pour le second de le faire à partir du relais, sous peine de se cogner au bout avec une vitesse comparable à celle d'une chute. La technique est d'utiliser la corde d'assurage placée en double pour se retenir, une méthode similaire étant aussi utilisée pour le sac de hissage, dont le contenu serait réduit en petits morceaux s'il était lâché sans précaution. Cela dit, la situation la moins enviable reste celle du premier de cordée, qui a le choix entre ne pas se protéger lorsqu'il remonte après le pendule, ou bien subir un tirage insupportable dû à l'angle effectué par la corde.

Après que Frank ait profité des derniers moments de jour finir une autre longueur, je commence à remonter en artif une fissure assez difficile, qui précède une traversée. Arrivé en haut de celle-ci, je tombe sur une corde fixe. Ne voyant rien d'autre dans la nuit noire, c'est naturellement que j'entreprends de la suivre, non sans difficulté car elle n'est que très peu tendue, et pend donc en arc de cercle en pleine paroi. A l'autre bout, surprise ! La corde n'est même pas amarrée solidement, mais juste coincée derrière une écaille, et surtout, elle n'a mené nulle part. Je finirai par trouver le relais dix mètres plus bas, et quinze mètres encore plus à gauche, mais d'autres manoeuvres acrobatiques seront encore nécessaires, d'abord à cause du sac coincé (le couteau nous sauva de justesse), puis de la corde d'assurage que nous n'arrivons pas à récupérer et que nous laissons provisoirement en place. Lorsqu'à l'aide de la corde de secours, nous arrivons au terme d'une dernière longueur bien difficile malgré la cotation 5.9 supposée, au camp 4, Frank m'annonce qu'il est déja bientôt quatre heures du matin. Et moi qui pensais qu'il n'était pas encore minuit, et m'étonnais de m'endormir au relais.

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